Le papier fut inventé à partir de chiffons et de fibres végétales. Le mot « texte » est issu du latin textus qui signifie tissu. Ces liens originels entre l’écriture et l’étoffe, à la fois dans la matière et l’étymologie, rappellent que l’univers du livre porte l’empreinte du textile.
Le « tissu » est sur toutes les lèvres. On passe du temps sur la toile, on espère tisser des liens, le tissu social, associatif, urbain, biologique, sont au coeur des préoccupations. Le fil de la conversation, celle que l’on noue ou que l’on coupe, les tissus de mensonges, les discours que l’on brode, la parole parfois décousue, le canevas et la trame du récit, la pensée que l’on veut étoffer, les stratagèmes cousus de fil blanc constituent des métaphores courantes qui façonnent notre langage et notre écriture.
Si l’on prend la peine de le regarder, de l’interroger, le tissu se fait aussi récit, document d’histoire, mémoire. Il raconte un vécu, il en détient la trame, la trace. Il se touche, se regarde, se respire, s’écoute, et c’est toute une écriture qu’il déclenche.
Text’Styles est le nom d’un label culturel illustrant la richesse de ces liens entre texte et textile, entre le livre et l’étoffe, entre l’écriture et le tissu.
Il s’agit ici de creuser le sens, de toucher les matières, d’écouter la langue, de croiser les écritures (littéraires, musicales, cinématographiques….), de saisir la mémoire : rencontrer,découvrir, partager, pour habiter et habiller poétiquement le monde.
« Ainsi un bout de fil peut-il me déclencher un monde.
Je travaille comme un jardinier ou comme un vigneron. Les choses viennent lentement »
Joan Miro
Yves Bonnefoy, Pensée d’étoffe ou d’argile
Illustration, oeuvre de Louise Bourgeois
Isabelle Baudelet pour Text’Styles, le 7 septembre 2016