Dans son perpétuel va et vient la mer laisse parfois sur le sable les froissements d’une étoffe de soie.
Mer,moire,miroir.
Photo ©Ib 06 mars 2018 Merlimont
Photo ©Ib 06 mars 2018 Merlimont
« Cher ami, que diriez-vous pour votre moire à grandes ondes, du nom : « l’eau qui dort »? Il vous est loisible d’écrire çà au goût du jour « Lokidor ». Il y a aussi « Lagune ».. Je vous salue avec amitié. »
Colette
Lettre de Colette à François Ducharne, soyeux lyonnais, vers 1930
Au coeur des dunes là toutes proches, des filets, des piquets, semblent assembler le sable comme un manteau, une robe..Confection de bordures et lisières dans ce paysage de la mer.
Photos ©Ib 06 mars 2018 Merlimont
« Et je goûtais, plutôt en curieux qu’en gourmet, tandis que le capitaine Nemo m’enchantait par ses invraisemblables récits.
« Mais cette mer, monsieur Aronnax, me dit-il, cette nourrice prodigieuse, inépuisable, elle ne me nourrit pas seulement ; elle me vêtit encore.
Ces étoffes qui vous couvrent sont tissées avec le byssus de certains coquillages ; elles sont teintes avec la pourpre des anciens et nuancées de couleurs violettes que j’extrais des
aplysis de la Méditerranée. Les parfums que vous trouverez sur la toilette de votre cabine sont le produit de la distillation des plantes marines. Votre lit est fait du plus doux zostère de l’Océan. Votre plume sera un fanon de baleine, votre encre la liqueur sécrétée
par la seiche ou l’encornet. Tout me vient maintenant de la mer comme tout lui retournera un jour !
— Vous aimez la mer, capitaine.
Jules Verne, Vingt milles lieues sous les mers, « L’homme des eaux », chapitre 10
Bientôt j’eus revêtu mes vêtements de byssus. Leur nature provoqua plus d’une fois les réflexions de Conseil. Je lui appris qu’ils étaient fabriqués avec les filaments lustrés et soyeux qui rattachent aux rochers les « jambonneaux, » sortes de coquilles très abondantes sur les rivages de la Méditerranée. Autrefois, on en faisait de belles
étoffes, des bas, des gants, car ils étaient à la fois très moelleux et très chauds. L’équipage du Nautilus pouvait donc se vêtir à bon compte, sans rien demander ni aux cotonniers, ni aux moutons, ni aux vers à soie de la terre.
Jules Verne, Vingt milles lieues sous les mers, « Une invitation par lettre« , chapitre 15
Notes du musée zoologique de Strasbourg :
Ces gants en soie marine furent offerts à Jean Hermann en 1790 par un Mr. Ribasse de Sicile. Jean Hermann note de sa main : « Paire de gants de femme de Byssus ou Lana pinna. Il faut les garantir des teignes plus soigneusement encore que la laine. Présent de Mr. Ribasse Sicilien qui, en 1789 et 1790, a fait chez moi un cours de minéralogie« .
Cette soie marine est fabriquée à partir du byssus d’un mollusque bivalve,Pinna nobilis. Ce sont les filaments qui permettent à l’animal de s’ancrer sur un rocher. Cette sorte de soie brune aux reflets dorés était une matière précieuse dans l’Antiquité et au Moyen Âge. Elle était utilisée pour confectionner les manteaux de rois ou des grands prêtres d’Égypte. En Sicile, en Sardaigne ou en Calabre, on en tissait des gants et une étoffe dite Tarentine.
Musée zoologique de Strasbourg
Isabelle Baudelet pour Text’Styles le 12 mars 2018