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Dictionnaire de la langue française, Littré 

Le coeur à Venise, mais les deux pieds fermement posés sur le sol parisien, j’ai voulu découvrir l’exposition proposée au Palais Galliera consacrée au « fils génial  » de la Sérenissime : Mariano Fortuny. L’étoffe, ce nom que l’on donne aux tissus, m’a semblé ici particulièrement croiser le texte et former un volume, un corps avec lui, une matière toute en chaîne et trame à part entière.

De fils en écritures, les étoffes de Mariano Fortuny (Grenade 1871 – Venise 1949) se déploient au-delà du tissu. Elles s’écrivent d’abord en croquis, notes et documentations…Elles se préparent sur les étagères de la bibliothèque.

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Puis lorsque ces merveilleux brocarts, ces velours et ces soies de lumières, pièces d’histoires et de voyages, sortent de l’atelier, ce sont d’autres lignes, d’autres lettres, d’autres pages qui se composent.

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Les pages littéraires inspirées par les étoffes de  Mariano Fortuny sont nombreuses :

« Ce fut sa diversité et sa prolixité qui firent de Fortuny cette figure tant appréciée des écrivains, de Proust à Pere Gimferrer en passant par d’Annunzio, l’un de ses amis, Henri de Régnier, Paul Morand, Mary Mc Carthy et Leslie Poles Hartley, tous ont chanté ses louanges et transforme l’homme en une silhouette mythique et légendaire, en faisant de Fortuny la figure emblématique de la Venise du début du XXe siècle. »

Mariano Fortuny, Monographie critique et postérité littéraire,  Delphine Desveaux, 1997

Voir : Le Manteau bleu d’Albertine 

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Mais il y a parfois dans les documents les plus simples toute une vraie poésie. Voici  une facture pour le Marquis de Polignac formant plus qu’un inventaire à la Prévert, une liste presque surréaliste :  Venise, le 6 septembre 1909 : « un Knossos, un Knossos monté, une robe grise, un manteau noir, 800 francs, payé ».

Une autre, « le 11 juillet 1924, pour Mrs Churchill, chambre 103, hôtel Danieli, un Delphos rose, payé »…

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Les brevets déposés par Mariano Fortuny composent une autre écriture :

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Des lettres de clientes anonymes écrivent, elles aussi, les étoffes..Une certaine Odette s’adresse à Mariano Fortuny le 18 juin 1909, il est question d’abricot, de bordure qui disparaît, de bleu..

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La nièce de Jeanne Lanvin note le 25 Août, sur un cahier, un journal personnel, sa visite chez Mariano Fortuny, un rendez-vous au jardin public où bien évidemment on se rend en bateau !

 

 

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Et puis il y a cette belle écriture, grande réplique d’un certain théâtre : « Monsieur, J’ai enfin ma robe ! Mais vous pouvez vous flatter de m’avoir fait attendre. J’ai cru mourir d’impatience. »

 

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« Fortuny était quelqu’un qui lisait beaucoup et sur qui on a ensuite beaucoup écrit. C’est quelqu’un qui prenait des notes dans énormément de cahiers, dans des petits papiers volants, qui avait une épouse qui prenait pas mal de notes aussi, qui avait une espèce de petite graphomanie qu’on peut suivre dans ces dépôts de brevets (…) et qui a une très jolie postérité littéraire »

Delphine Desveaux sur France Culture le 12 novembre 2017 :

https://www.franceculture.fr/emissions/lart-est-la-matiere/liberation-des-corps-par-mariano-fortuny-en-diff-le-12-novembre

 

Isabelle Baudelet pour Text’Styles, le 12 novembre 2017

En navette M sur M – Le Havre- Paris   8-10 novembre 2017

Photographies Isabelle Baudelet au Palais Galliera, Paris, musée de la mode :

Exposition  » Fortuny, un espagnol à Venise’ , 4/10/2017 – 7/01/2017